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SAINTE-ANNE DE LA PALUDE


La malade s’efforce d’en répéter les termes, la nuque renversée, les yeux levés vers l’image de la sainte, dans une attitude vraiment sculpturale de douleur et de supplication.

C’est une remarque vingt fois faite. Morceaux de paysages, groupes de gens, tout en Bretagne s’organise en tableau, spontanément, par une sorte d’instinct secret. L’artiste n’a qu’à transposer, presque sans retouche.

Sous ce rapport, la procession de la Palude est une merveille. Il n’y a pas d’autre mot pour la caractériser. Impossible de concevoir quelque chose de plus complet, une vision d’art plus intense, plus harmonieuse et plus variée.

Un ciel qui poudroie, une brume d’or, comme dans certaines peintures des Primitifs… L’église en clair avec des tons lilas, aérienne, vibrante, toutes ses cloches en branle tourbillonnant, pour ainsi dire, au-dessus d’elle… Çà et là, des verts pâlis, effacés, le gris des tentes, la rousseur des falaises et, par derrière, la vasque splendide de la Baie, ses grands azurs calmes, la frise ouvragée