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poussent et n’attendent pas. Les décisions que ces derniers provoquent ont souvent une importance considérable, car les conséquences d’une erreur peuvent s’appesantir sur plusieurs générations. Le siècle qui précéda le nôtre en fournit de nombreux exemples.

Les plus importantes des règles du gouvernement des hommes sont celles relatives à l’action. Quand agir, comment agir et dans quelles limites agir ? La réponse à ces questions constitue tout l’art de la politique.


Une analyse attentive des fautes politiques dont est parsemée la trame de l’histoire montre qu’elles eurent généralement pour causes des erreurs de psychologie.

Les arts et les sciences sont soumis à certaines règles qu’on ne peut impunément violer. Il en existe d’aussi précises pour gouverner les hommes. Leur découverte est fort difficile, sans doute, puisque très peu jusqu’ici ont été nettement formulées.

Le seul véritable traité de psychologie politique connu fut publié il y a plus de quatre siècles par un illustre Florentin que son œuvre rendit immortel.

Le marbre luxueux qui protège son sommeil éternel est édifié sous les voûtes de la célèbre église Santa-Croce à Florence. Ce panthéon des gloires de l’Italie renferme de magnifiques monuments élevés à la mémoire des hommes qui firent sa grandeur Michel-Ange, Galilée, Dante, etc. Les mérites de ces demi-dieux de la pensée y sont gravés en lettres d’or.

Dans cette galerie d’illustres ombres il n’est guère qu’un tombeau sur lequel de longues inscriptions aient été jugées inutiles. Une seule indication y figure :

MACHIAVEL, 1527
Tanto nomini nullum par elogium
(nul éloge n’égale un tel nom)

L’œuvre qui valut à son auteur une épitaphe si glorieuse et si brève est le petit volume intitulé Le Prince, auquel je faisais allusion plus haut. L’illustre écrivain y formulait des règles précises sur l’art de gouverner les hommes de son temps.

De son temps et non d’un autre. C’est pour avoir oublié cette condition essentielle que le livre tant admiré d’abord fut décrié plus tard lorsque les idées et les mœurs ayant évolué, il cessa de traduire les nécessités des âges