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LIVRE I
BUT et MÉTHODE




CHAPITRE I
La psychologie politique


La première manifestation des progrès d’une science est de renoncer aux explications simples dont se contentent ses débuts. Ce qui paraissait d’abord facile à comprendre devient plus tard très difficile à expliquer.

Les études relatives à l’Évolution de la vie des nations ont subi la même loi. Après avoir essayé de tout interpréter, les historiens entrevoient maintenant qu’ils dissertaient souvent sur des illusions nées dans leur esprit.

Les phénomènes sociaux apparaissent aujourd’hui comme des mécanismes extrêmement compliqués, étroitement hiérarchisés et où la simplicité ne s’observe guère. L’évolution des peuples est aussi complexe que celle des êtres vivants.

La science cherche encore les lois qui déterminent les transformations des espèces et conditionnent leurs formes successives. Les lois de l’évolution sociale restent aussi peu connues. Quelques-unes seulement sont entrevues.

L’analyse des divers éléments dont l’agrégat constitue une société n’étant pas sortie de la phase des généralisations vagues et des assertions conjecturales, la vision des choses dont se contentent les théoriciens de l’inconnu demeurent très fragmentaires encore. Dans l’enchevêtrement des nécessités dirigeant la trajectoire de la vie d’un peuple, ils choisissent celles qui frappent leur esprit et négligent les autres. C’est pourquoi le récit des actes des souverains et surtout de leurs batailles semblait devoir constituer l’unique intérêt de l’Histoire. Tout ce qui concernait l’existence des peuples était, il y a peu de temps encore, dédaigné ou ignoré.

La science ne se contente plus des réponses sommaires faites jadis au "pourquoi" qui se hérissent de toutes parts et dont la vie politique des nations est remplie. Pourquoi