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supporte doublement, en tant que patron.

Est-ce à dire qu’en échange de ces sacrifices croissants, on lui assure la protection à laquelle il a droit ? Nullement. De temps en temps, les volontaires de l’action directe vont lui rendre visite. Si le commerçant n’obtempère pas à leurs sommations, il y est contraint par la force. Des syndiqués se répandent dans ses locaux, envahissent ses "rayons", chassent les commis, épouvantent les acheteurs.

Les commerçants détaillants, race taillable et corvéable à merci, se rebiffent enfin. Ils se montrent fermement résolus à se défendre eux-mêmes s’ils ne sont pas défendus et projettent l’organisation d’une milice qui opposerait la force à la force. Voilà où l’indifférence des gouvernements qui se succèdent depuis des années nous conduit à la défense directe des citoyens molestés.

Ce qui précède ne concerne que la défense immédiate contre des violences. Il serait autrement important d’acquérir quelques principes fixes, capables de nous orienter un peu, au sein du désordre où nous sommes plongés, et de lutter contre les forces qui désagrègent de plus en plus l’édifice social.

Ce sont justement ces principes fixes qui nous manquent. Quelques-uns des faits enregistrés quotidiennement par les journaux, et qui constituent d’utiles fragments de notre histoire sociale, trahissent une psychologie que les hommes de l’avenir ne comprendront plus. Quelle aventure typique, celle de ces manifestants, conduits par leur député, arrêtant brusquement un train-express à Villeneuve-le-Roi, au risque de produire une catastrophe, dans le but d’obliger la Compagnie à leur donner une gare. Il faut une mentalité de sauvages pour en arriver là.


Quand le mépris des lois est général, que le principe d’autorité a disparu et que toutes les disciplines qui font la force d’une civilisation s’évanouissent, l’écroulement d’une société est proche. Rien n’est respecté aujourd’hui en dehors de la force. Le fonctionnaire est insolent devant ses chefs, le matelot devant son capitaine, l’ouvrier devant son patron.

Et il faut bien reconnaître aussi, que les vieilles autorités perdent chaque jour leur droit à être respectées. La magistrature ne rend plus la justice et semble réserver