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Les dieux changent quelquefois, mais ils ne peuvent mourir. Une croyance nouvelle vient bientôt se substituer à celle usée par les siècles.

Les dogmes socialistes tendent aujourd’hui à remplacer les dogmes chrétiens. Leur principale force est de pouvoir se rattacher aisément aux croyances ancestrales. L’État providence est une forme affaiblie du ciel providence de nos pères. Les paradis socialistes sont proches parents de ceux des primitives légendes.

Il n’en fut jamais autrement. Les peuples très vieux, portant le poids d’hérédités très lourdes, ne peuvent guère posséder que d’anciennes croyances transformées et, par conséquent, changer simplement leurs noms. Les sentiments qui ont demandé des successions d’âges pour se fixer dans l’esprit ne sauraient brusquement disparaître.

C’est en partie pour cette raison que, malgré le peu d’élévation de son idéal, la foi socialiste, héritière immédiate de la foi chrétienne, progresse dans l’esprit des foules. Elle rend aux simples l’espérance, que les dieux ne leur donnaient plus, et les illusions que la science leur avait ôtées.

Ses apôtres poursuivent bien à tort d’une haine intense les vieux dogmes. Cléricaux, socialistes, anarchistes, etc., sont des variétés voisines d’une même espèce psychologique. Leur âme est ployée sous le poids de semblables chimères. Ils ont une mentalité identique, adorent les mêmes choses et répondent aux mêmes besoins par des moyens peu différents.

Si les propagateurs de la religion nouvelle se bornaient à prêcher pacifiquement leur doctrine, ils ne seraient pas trop dangereux, mais les socialistes partagent avec tous les apôtres ce caractère commun, de vouloir imposer par la force l’idéal qu’ils croient destiné à régénérer le monde.

La haine que la société inspire à des esprits, dominés par un atavisme religieux à peine laïcisé, se répand rapidement parmi les ouvriers. Le sort de ces derniers est beaucoup plus heureux aujourd’hui que jadis et cependant, leurs malédictions contre l’organisation actuelle, sont identiques à celles des premiers chrétiens envers le monde antique qu’ils finirent par détruire.


Bien que l’attaque de la société s’accuse chaque jour plus violente, sa défense reste aussi molle que celle du