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malheureusement le demander à notre Université.

Il faut considérer encore qu’en Suède la bourgeoisie n’a pas ce caractère résigné et veule si commun en France et qui facilite son dépouillement, sans autre protestation que de vains discours. Si elle ne songe pas à s’associer pour se défendre, la bourgeoisie française arrivera vite à être complètement spoliée, puis à disparaître.

Nous vivons à une époque, écrivait récemment monsieur S. Lauzanne, vis-à-vis de l’État, il ne sert à rien de se montrer éloquent, humilié ou attendrissant : il faut se montrer fort. Regardez tout ce que les ouvriers obtiennent chaque jour ; c’est qu’ils sont unis, puissants et rudes.

Regardez au contraire comment, chaque matin, on s’assoit un peu plus sur les bourgeois, les industriels et les commerçants : c’est qu’ils sont divisés, timides et mous. Ils appartiennent à ce qu’un ancien président des États-Unis appelait "type flasque".


Ces tentatives de grève générale, les révoltes de fonctionnaires comme celle des postiers, les prononciamentos militaires en Grèce, etc., peuvent sembler issus de causes diverses. En réalité, ce sont des phénomènes semblables, résultats d’une même loi psychologique vérifiée par l’histoire chez tous les peuples, à toutes les époques.

Cette loi peut se formuler ainsi : chaque fois que dans une société une classe quelconque voit par un motif quelconque son influence s’accroître, elle tend aussitôt à devenir prépondérante et asservir les autres.

La prépondérance initiale, qui précède l’absorption finale, se produit dès que les divers éléments constitutifs de la vie sociale, cessent de se faire équilibre. La vie d’un peuple, comme celle d’un individu, ne peut se maintenir que par l’équilibre des forces en présence. Le trouble de cet équilibre, c’est la maladie. La persistance du trouble, c’est la mort. Il existe des maladies sociales comparables aux maladies individuelles. Un traité de pathologie sociale complet formerait certainement un gros livre. Mais si les empiriques proposant des remèdes pour ces maladies sont innombrables, les savants capables de déterminer leur genèse demeurent singulièrement rares.

Un coup d’œil très sommaire, jeté sur l’histoire, suffit pour justifier cette loi de la tendance constante à dominer des diverses classes sociales par celle devenue prépon-