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ment. Anarchie d’abord, révolte ouverte ou tout au moins haine profonde des populations, ensuite. Les témoignages, malheureusement, sont unanimes sur ce point.

La cause réelle de la piraterie en Indo-Chine, lisons-nous dans un ouvrage récent, n’est pas une idée de patriotisme qui soulèverait les populations indigènes contre l’envahisseur. C’est nous qui l’avons suscitée. Nous avons indisposé les populations paisibles en réquisitionnant des porteurs, en éloignant de leurs terres des agriculteurs pour en faire des coolies, en brûlant des villages, en tyrannisant les indigènes, en établissant partout et sur tout des taxes lourdes, dépassant 3 ou 4 fois la valeur des produits. La piraterie n’est que le résultat des tracasseries de nos administrateurs et des crimes des mandarins que nous couvrons.

Notre ruineux système ne sème pas ses tristes conséquences uniquement en Indo-Chine. Nous tentons également d’assimiler toutes nos colonies anciennes et nouvelles, et partout avec le même insuccès. Je ne veux pas rappeler, car cet exemple n’est pas exactement applicable à ma démonstration actuelle, que la cause du dernier bouleversement qui faillit nous enlever l’Algérie fut l’incompréhensible mesure par laquelle nous avons naturalisé en bloc toute la partie juive de la population. Mais je citerai, d’après des témoins oculaires, les faits observés au Sénégal. Dans une série d’articles publiés par un grand journal parisien, monsieur Colin montre jusqu’où peut conduire la manie d’imposer nos institutions à des peuples qui n’en veulent pas.

En nous attaquant prématurément à l’organisation de la société nègro-arabe, dit monsieur Colin, nous aurons la guerre, la guerre perpétuelle et sans merci, et nous trouverons devant nous tous les peuples fétichistes et musulmans, sans compter que les esclaves eux-mêmes seront contre nous.

Peut-être pas la guerre durable, ni au Sénégal ni dans nos autres colonies, tant que, très visiblement, nous resterons les plus forts. Mais l’hostilité des populations si maladroitement troublées, nous l’avons éveillée partout.

Un observateur judicieux, ayant longtemps habité nos colonies, monsieur Poitou-Duplessis, ancien médecin principal de la marine, écrit :

L’application prématurée du sucrage universel aux co-