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Mais c’est surtout le contact des employés subalternes élevés dans les écoles anglaises, qui révèle leur absence profonde de moralité. L’administration anglaise, parfaitement édifiée sur ce point, est obligée de prendre les précautions les plus minutieuses et de multiplier à l’infini les moyens de contrôle pour se mettre à l’abri des déprédations de ses agents hindous des chemins de fer et des postes.

Pourquoi cette immoralité ne s’observe-t-elle que chez les indigènes élevés à l’européenne ? Simplement parce que notre éducation, mal adaptée à la constitution mentale de l’Hindou, a eu pour conséquence de détruire en lui les résultats des influences ancestrales, d’ébranler les vieilles croyances sur lesquelles se basait autrefois sa conduite, et de les remplacer par des théories trop abstraites pour lui. Il a perdu la morale de ses pères, sans avoir pu adopter celle des Européens. Jadis dépourvu de besoins, sa nouvelle éducation lui en crée une foule, sans lui donner les moyens de les satisfaire. Il méprise ses frères, mais se sent méprisé par ses maîtres. Ne trouvant plus de place dans la société, désorienté et misérable, il devient forcément l’implacable ennemi de ses éducateurs.

Ce n’est pas l’instruction elle-même, assurément, mais je le répète, une instruction mal adaptée à la constitution mentale d’un peuple, qui produit ces tristes effets. On peut s’en convaincre par la comparaison des résultats de l’éducation européenne avec ceux de l’éducation exclusivement hindoue telle qu’elle se pratique depuis des siècles.

Les lettrés hindous, élevés par des Hindous, sont des hommes instruits, honnêtes, estimables, dont plusieurs pourraient figurer dans les grandes assemblées savantes européennes, et dont la conduite pleine de dignité est sans parenté avec l’attitude à la fois insolente et rampante des Hindous sortis des écoles anglaises.

L’inimitié pour leurs maîtres, des indigènes élevés à l’européenne n’est aucunement spéciale à l’Inde.

Nous avons commis les mêmes erreurs en Indo-Chine et récolté les mêmes résultats. La preuve en est fournie par l’extrait suivant d’un rapport de monsieur Klobukowski gouverneur de l’Indo-Chine, reproduit par Le Journal du 27 décembre 1909.

Après avoir constaté l’antipathie croissante des Annamites contre nous, monsieur Klobukowski ajoute :