Page:Le Bon - Psychologie politique et défense sociale.djvu/210

Cette page a été validée par deux contributeurs.

par faire leur chemin. Dans son remarquable ouvrage, Domination et Colonisation, un des hommes les plus familiers avec les choses de l’Orient, monsieur l’ambassadeur Jules Harmand, s’exprime de la façon suivante :

C’est la plus grande des erreurs et la plus fatale pour le conquérant et pour ses sujets de ne pas reconnaître qu’il y a des races et des sociétés supérieures de par la nature et par l’accumulation des circonstances évolutives, qu’il y en a d’autres moins favorisées, et que plus la distance qui les sépare est grande et moins il est possible de les rapprocher par des lois communes et par les mêmes procédés de culture.

… Ce sont ces convictions, dictées par l’observation des faits, qui doivent inspirer la conduite des Européens dans leur expansion lointaine, accomplie par la domination des peuples si différents d’eux-mêmes. Leur application seule, résolument désassimilatrice, systématiquement respectueuse de la constitution mentale de ces peuples, des organisations politiques et sociales qui sont la résultante de leurs besoins matériels et moraux, peut-être profitable en même temps au dominateur et au sujet, et justifier ces vastes et difficiles entreprises.

Nos hommes politiques sont pour la plupart très loin encore de ces idées. Couramment des administrateurs font traduire et afficher, dans les pays barbares qu’ils gouvernent, la proclamation des Droits de l’homme, pour se concilier les populations envahies et leur faire apprécier les bienfaits de nos institutions. Cette enfantine conception donne l’exacte mesure de leur mentalité en matière de colonisation.


À nos méthodes d’assimilation forcée se joignent, dans les colonies un peu éloignées, des procédés d’autocratie jacobine, qui les rendent rapidement inhabitables pour des Européens. Le moindre petit gouverneur (fruit sec de la politique le plus souvent), se croit un potentat et se conduit en despote asiatique.

Le Matin du 29 mars 1910 contenait à ce sujet une correspondance d’un voyageur à la Guyane dont voici un extrait :

Les hauts fonctionnaires envoyés de la métropole ne passent que pour amorcer une affaire ou une candidature. S’ils séjournent un peu, ils sont en proie à la folie auto-