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listes, que les minorités seules ont le droit d’imposer leurs volontés.
… Ainsi apparaît, écrit l’un d’eux, l’énorme différence de méthode qui distingue le syndicalisme du démocratisme : celui-ci, par le mécanisme du suffrage universel, donne la direction aux inconscients, aux tardigrades et étouffe les minorités, qui portent en elles l’avenir. La méthode syndicaliste donne, elle, un résultat diamétralement opposé. L’impulsion est imprimée par les conscients, les révoltés.

Et sur quoi est fondée cette aptitude d’une minorité de révoltés ? Uniquement sur l’instinct. Les maîtres du parti assurent que "le plus simple ouvrier, engagé dans le combat, en sait davantage que les plus abscons doctrinaires de toutes les écoles". L’ouvrier insurgé, bien entendu, s’il est membre de la C.G.T., devient ainsi une sorte de baron féodal placé au dessus des lois.

Les conseils qu’on lui donne sont, en effet, ceux qui pourraient être présentés à un souverain absolu, n’ayant pas à tenir compte des codes.

Il faut aller de l’avant, se laisser porter par sa propre impulsion naturelle, ne se fier qu’à soi-même et se dire que ce n’est pas à nous à nous adapter à la légalité, mais à la légalité à s’adapter à notre volonté.

Les autocrates étant placés au dessus des lois, l’aristocratie constituée par les membres de la C.G.T. n’est pas tenue à les respecter.

L’ouvrier français, écrit un des grands chefs de la nouvelle autocratie, est au dessus de toute autorité, de toute hiérarchie. Il ne se demande pas, avant d’agir, si la loi lui permet ou non d’agir. Il agit et voilà tout.

Évidemment, Louis XIV et Napoléon étaient plus modestes et moins convaincus de leur grandeur.

Quant à la foule, jamais despote asiatique ne manifesta à son égard autant de mépris que les nouveaux potentats. Ils assurent, et en ceci n’ont pas tort, que les masses adoptent tout ce qu’on leur suggère et sont incapables de réflexion. En cas de révolution, le peuple se tournera du côté des plus hardis. En temps ordinaire, il n’a qu’à se taire. "Les conscients, les militants ont seuls le droit de parler au nom de la classe ouvrière." Naturellement, les conscients sont les directeurs de la C.G.T.

Pénétrés de l’infériorité de la vile multitude, ils la