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tes les ruines accumulées ils n’ont fait que grandir, et on entrevoit le jour où ils seront définitivement nos seuls maîtres.


Presque autant que la classe des instituteurs et des fonctionnaires, celle des ouvriers a été depuis vingt ans favorisée par les législateurs. Cependant ces derniers n’ont pas de plus bruyants adversaires. Nul besoin d’être un Machiavel pour expliquer ce phénomène. Il résulte des invariables lois de la psychologie populaire. Les foules ne respectent que les gouvernements forts. Elles n’ont jamais je l’ai dit déjà, de reconnaissance pour ce qu’elles obtiennent par les seules menaces. Le mépris du faible a toujours été leur loi.

L’anti-parlementarisme des ouvriers en général, et de la C.G.T. en particulier, est indiscutable. Leur haine contre les législateurs s’adresse à tous les partis, aux socialistes surtout. Pour les cléricaux seulement ils manifestent parfois quelque indulgence, sans doute parce que leur mentalité est assez voisine.

L’ouvrier rêve aujourd’hui d’une autocratie populaire nouvelle dressée contre l’autocratie jacobine. Il est persuadé que, grâce à ses mystérieuses capacités, le prolétariat réalisera ce que n’a pu réaliser la bourgeoisie : le bonheur universel.

À force d’entendre les parlementaires lui promettre des miracles, lui proclamer tous les jours qu’il est le maître souverain de toutes choses, investi de tous droits, sans nul devoir, qu’il n’a qu’à vouloir pour pouvoir, le Nombre, écrit monsieur Jules Roche, a fini par croire ses courtisans.

"Plus de politiciens ! Plus d’action parlementaire ! Tout par l’action directe" est aujourd’hui la devise des entraîneurs populaires.

Sentant cette hostilité croissante, les socialistes avancés ont tâché de la combattre par des flatteries, mais ils n’ont abouti qu’à des échecs et en sont arrivés à ne plus oser se montrer dans les grands meetings ouvriers. Quand par hasard ils essaient de s’y insinuer, c’est pour se voir accueillis de la plus insolente façon. On en jugera par les extraits suivants d’un compte rendu que j’emprunte au journal Le Temps du 21 mai 1909  :

Monsieur Dejeante, députe de Paris, essaye d’obtenir