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actuellement discuter en pleine lumière et suivre l’opinion au lieu de la précéder.

Et cependant leur rôle, injustement dédaigné, garde une certaine utilité. Des événements récents l’ont mise en évidence.

Plusieurs questions importantes furent en effet solutionnées grâce à des interventions diplomatiques. Bombardement des bateaux pêcheurs anglais par des cuirassés russes au début de la guerre avec le Japon, affaire de Casablanca, différend austro-russe à propos de la Serbie, etc. Si nous avions, à la veille de 1870, possédé des diplomates moins au-dessous de la plus navrante médiocrité, la guerre eût été ajournée à un moment où nous eussions pu préparer des alliances et non à celui choisi par l’ennemi.

C’est la psychologie politique encore qui apprend à résoudre des problèmes posés chaque jour. Discerner, par exemple, quand il faut céder ou résister aux exigences populaires. Selon leur tempérament, les hommes d’État cèdent indéfiniment ou résistent toujours. Détestable principe. Suivant les circonstances, il faut savoir résister ou au contraire céder. Aucune partie de la psychologie politique n’est plus difficile, et les conséquences des erreurs plus graves. La Révolution française eût été peut-être évitée, sûrement atténuée, si à l’époque de la crise agricole et financière de 1788 qui avait accru la misère des classes ouvrières par la disette et le chômage, la classe aristocratique n’eût pas persisté à refuser l’égalité fiscale.

Il en résulta une haine intense contre les classes privilégiées et les émeutes qui engendrèrent la désagrégation d’un long passé.


Frappé autrefois de l’absence d’ouvrages spéciaux sur la psychologie politique, j’espérais toujours voir combler cette lacune.

Après dix années presque exclusivement consacrées aux expériences de physique d’où mon livre sur l’Évolution de la matière est sorti, ces recherches devinrent trop coûteuses pour être continuées. Je dus donc les abandonner et me résignai à reprendre d’anciennes études. Désireux d’appliquer à la politique les principes exposés dans plusieurs de mes précédents ouvrages, je priai mon éminent ami, le professeur Ribot, de m’indiquer les traités de psychologie politique publiés récemment. Sa réponse m’ap-