dulité. Les paradis socialistes ont remplacé ceux des légendes. Les dieux morts ont pour successeurs des tables tournantes, des somnanbules et des fétiches.
La crédulité des foules et celle des esprits primitifs sont presque égales. Les faiseurs de prospectus et d’annonces le savent bien et ils connaissent aussi le rôle suggestif de l’affirmation et de la répétition. De grosses fortunes s’édifient chaque jour sur l’annonce d’agents thérapeuthiques aux propriétés purement chimériques.
Si l’on fait entrevoir aux âmes simples un gain considérable par une annonce suffisamment suggestive, le bénéfice est plus certain encore. Des légions de financiers vivent des promesses les plus invraisemblables habilement répétées. Leur rédaction ne demande aucuns frais d’imagination. Il suffit de toujours affirmer les mêmes choses dans les mêmes termes. Le Globe a raconté l’instructive histoire des actions d’une certaine mine de la République Argentine n’ayant jamais fonctionné. Tous les six mois, des prospectus répandus par millions répètent qu’un dividende énorme va être très prochainement distribué et que l’action devant décupler de valeur il faut en acheter de suite. Convaincu, le petit capitaliste se précipite vers le guichet pour ne pas manquer une pareille occasion. Bien entendu aucun dividende n’est jamais versé. Et pourtant il y a cinq ans que l’opération se répète et grâce à ces habiles annonces, le public a absorbé pour 12.000.000 de titres dont la valeur ne dépasse pas notablement celle du poids du papier.
Les faits du même ordre sont innombrables, le journal qui relatait le précédent, choisi entre mille, ajoutait :
"La crédulité de l’épargne est insondable. Elle est sans bornes comme l’infini. Elle ne demande ni preuves, ni vraisemblance des promesses et des affirmations lui en tiennent lieu. Elle se laisse bercer et endormir par de charlatanesques boniments et plus ils sont grossiers et de qualité inférieure, plus elle s’y abandonne sans réserve. Que les espérances qu’on fait miroiter à ses yeux soient manifestement folles, que le lendemain même elles soient démenties par les faits, peu lui importe. Elle est tellement confiante et aveugle qu’elle en veut parfois davantage à ceux qui lui dessillent les paupières qu’aux histrions qui l’ont trompée."
Transposez ce qui précède à la politique et vous aurez