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nous voulions comparer l’ouvrier parisien à des ouvriers italiens ou allemands travaillant dans les mêmes conditions, c’est-à-dire soumis eux aussi aux mêmes influences de milieu. Nous n’entreprendrons pas cette étude, et nous nous bornerons à faire observer que ces influences de race se constatent nettement sur des ouvriers de Paris venus de certaines provinces, les Limousins par exemple. Plusieurs des caractères psychologiques énumérés plus loin ne s’appliqueraient nullement a ces derniers. L’ouvrier limousin est sobre, patient, silencieux, sans aucun besoin de bruit ni de luxe. Ne fréquentant ni les marchands de vin, ni les théâtres, il n’a d’autre rêve que de rentrer au village après avoir réalisé quelques économies. Il se confine dans un petit nombre de métiers durs, mais fort bien rétribués, celui de maçon par exemple, pour lesquels sa sobriété et sa régularité le font très rechercher.

Ces principes généraux et ces divisions étant posés, nous allons aborder maintenant la psychologie des ouvriers parisiens, ayant surtout en vue, comme il a été dit, la classe des artisans. Voici les caractéristiques les plus frappantes de leur état mental.

L’ouvrier parisien se rapproche des êtres primitifs par sa nature impulsive, son imprévoyance, l’incapacité de se dominer et son habitude de n’avoir pour guide que l’instinct du moment. Mais il possède un sens artistique, parfois critique, très affiné par le milieu où il vit. En dehors des choses de son métier, qu’il exécute très bien, (avec plus de goût cependant que de fini), il raisonne peu ou mal, et n’est guère accessible à d’autre logique qu’à celle des sentiments.

Il aime à se plaindre et à déblatérer, mais ses plaintes sont plus passives qu’actives. Il est au fond très conservateur, très casanier, et n’a guère de goût pour le changement. Indifférent aux doctrines politiques, il s’est toujours soumis facilement à tous les régimes, pourvu qu’ils eussent à leur tête des individus possédant du prestige. Le panache d’un général produit toujours sur lui une sorte d’émotion respectueuse à laquelle il ne résiste guère. On le mène aisément avec des mots et du prestige et pas du tout avec des raisons.

Il est très sociable et recherche la compagnie