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Mais quand on ne sort pas des rêveries, il est facile de tout promettre, et, comme le Prométhée d’Eschyle, de "faire habiter dans l’âme des mortels les aveugles espérances".

L’homme changera donc pour s’adapter à la société nouvelle créée par les socialistes. Les différences qui séparent les individus disparaîtront, et nous ne connaîtrons plus que le type moyen si bien décrit par le mathématicien Bertrand "Sans passions ni vices, ni fou ni sage, d’idées moyennes, d’opinions moyennes, il mourrait a un âge moyen, d’une maladie moyenne inventée par la statistique."

Les procédés de réalisation proposés par les diverses sectes socialistes sont variés dans la forme quoique tendant à un même but. Ils se ramènent finalement à obtenir l’accaparement rapide de la terre et des richesses par l’État, soit par simple décret, soit en élevant énormément les droits de succession, ce qui amènerait la suppression des fortunes familiales en un petit nombre de générations.

L’énumération des programmes et des théories de ces diverses sectes serait sans intérêt, car le collectivisme prédomine aujourd’hui parmi elles et possède seul de l’influence, du moins dans les pays latins. La plupart de ces sectes sont d’ailleurs déjà tombées dans l’oubli. "C’est ainsi que le socialisme chrétien, qui tenait la tête en 1848, marche maintenant au dernier rang", ainsi que l’a fait observer depuis longtemps Léon Say. Quant au socialisme d’État, son nom seul a changé. Il n’est autre chose que le collectivisme actuel. A propos du socialisme chrétien, on a fait remarquer avec raison qu’il se rencontre sur beaucoup de points avec les doctrines modernes : "Comme le socialisme, écrit monsieur Bourdeau, l’Église n’accorde aucune valeur à tout ce qui est esprit, talent, grâce, originalité, dons personnels. Individualisme est pour elle synonyme d’égoïsme ; et ce qu’elle a toujours cherché à imposer au monde, c’est le but même du socialisme : la fraternité sous l’autorité. Même organisation internationale, même réprobation de la guerre, même sentiment des souffrances et des besoins sociaux. Selon Bebel, c’est le pape qui, du haut du Vatican, voit le mieux se former l’orage qui s’amoncelle à l’horizon. La papauté serait même suscep-