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modeste et ignoré « Institut commercial de Paris », qui comptait dix candidats par an avant la loi, en a compté une centaine ensuite.

On voit à quel point le service militaire est redouté en France des classes lettrées. Ceux qui le fuient ne se doutent pas combien ils gagneraient à le subir. Certes, comme l’a dit justement un ministre de l’Instruction publique dans un discours, le but de l’enseignement classique devrait être de former une élite, car c’est cette élite qui fait la grandeur du pays, mais elle n’est apte à remplir son rôle que si son caractère est à la hauteur de son instruction. Pour pouvoir commander un jour, il faut d’abord qu’elle apprenne à obéir.

Elle doit avant tout acquérir l’esprit de solidarité et de discipline dont manquent si complètement les peuples latins. À l’armée, on apprend à se supporter, puis à s’aider et enfin à s’aimer. On apprend la discipline quand on en subit la nécessité. On apprend à se dominer et on acquiert le sentiment du devoir quand le milieu l’impose. Pour se discipliner soi-même, si on ne l’est pas héréditairement, il faut d’abord avoir été discipliné par d’autres. À la discipline externe la discipline interne succède bientôt par association inconsciente de réflexes. L’homme qui ne sait pas subir la première pour acquérir la seconde restera, dans le cours de sa vie, une insignifiante épave.

Le séjour au régiment, surtout quand le soldat passe quelque temps aux colonies, lui apprend bien autre chose encore. Il lui enseigne surtout à se « débrouiller », comme on dit vulgairement. On sait tout le parti qu’un général habile sut tirer à Mada-