Page:Le Bon - Psychologie de l’Éducation.djvu/307

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Les enfants ne sont pas aptes à le recevoir, car ils n’ont encore à leur disposition que la mémoire. Cette faculté leur permet d’emmagasiner des mots, dont ils n’arrivent pas toujours à comprendre le sens. Ils saisissent les mots par leur ressemblance extérieure, ils les confondent ensuite et diront volontiers « acide » pour « silice » ou inversement[1].

La pauvreté d’un tel raisonnement montre une fois de plus à quel point la psychologie de l’enfant est ignorée dans l’Université. Que l’enfant confonde les mots silice et acide, quelle importance cela peut-il bien avoir ? Ce qui importe, c’est qu’il ne confonde pas les choses qu’on lui montre, or quand il les aura vues et touchées, il ne les confondra jamais. Si on lui met dans la main des morceaux de coke et d’anthracite ou des fragments de plomb et d’aluminium, il pourra confondre le nom de ces substances, mais les reconnaîtra toujours à leur différence de densité quand on les lui présentera de nouveau. Ce sont des réalités et non des mots que doivent lui enseigner les leçons de choses. Voilà ce que les universitaires, qui raisonnent comme l’inspecteur que je viens de citer, n’ont pas encore réussi à comprendre.

Dans une conférence fort intéressante, M. Laisant a insisté longuement sur l’utilité, pour le développement de l’esprit, de donner à l’enfant dès le jeune âge l’habitude de l’observation et de la réflexion par des expériences scientifiques faites avec les objets usuels. Des savants éminents n’ont pas dédaigné de consacrer des ouvrages spéciaux à ces récréations scientifiques. Elles permettent de constater d’importantes lois physiques avec des objets qu’on trouve partout sous la main ou de petits instruments très peu

  1. Enquête, t. I, p. 247. Dupuy, inspecteur général de l’enseignement, ancien professeur de rhétorique.