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rement, jusqu’au jour où l’opinion publique, suffisamment révoltée, obligera l’Université à évoluer.

En attendant cet âge lointain, force est bien de s’accommoder de ce qui existe. Recherchons donc si, à défaut de l’art de parler et comprendre une langue étrangère, que nous sommes incapables d’enseigner aux élèves, nous ne pouvons au moins leur apprendre l’art de la lire couramment, ce qui serait déjà un fort utile résultat.

Nous allons voir que, sans professeur, sans grammaire, sans dictionnaire, et presque sans travail, un individu quelconque peut, comme je l’ai constaté sur moi-même et sur d’autres, atteindre ce but en moins de deux mois, pour une langue de difficulté moyenne, comme l’anglais, avec une dépense de temps de deux heures par jour. Je me hâte d’ajouter que je ne suis nullement l’inventeur de cette très ancienne méthode, qui fut employée jadis pour enseigner rapidement le latin à la reine Anne d’Angleterre.

Elle repose sur notre principe général de substituer le plus rapidement possible le travail inconscient au travail conscient, et je lui ai seulement ajouté la condition de choisir des livres tellement captivants que l’élève les lise par curiosité et n’ait par conséquent aucun labeur fastidieux.

Dans les deux mois dont j’ai parlé, quinze jours au plus, en effet, sont consacrés à un travail ennuyeux. Quinze jours de travail, à deux heures par jour, sont en réalité le seul effort que je demande à l’individu le plus obtus pour apprendre à lire couramment l’anglais. Durant les six semaines ajoutées à ces quinze jours, je lui propose, non du travail, mais une intéressante distraction.