Page:Le Bon - Psychologie de l’Éducation.djvu/231

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

saires et l’éducation doit intervenir à chaque génération, mais elle intervient de moins en moins, et, dès leurs premières années, ils commencent à faire ce que leurs ancêtres ne pouvaient accomplir que vers la troisième ou quatrième année.

Toutes les remarques qui précèdent nous permettent de comprendre le rôle que peut jouer l’éducation dans la formation des qualités ou des défauts d’un peuple. Formés par certaines nécessités d’existence et de milieu persistant pendant plusieurs générations, ils ont fini par devenir héréditaires et survivent aux conditions qui les ont fait naître. Les caractères psychologiques des peuples constituent en réalité des instincts que la nécessité a créés.

Il est évident, par exemple, qu’une nation pauvre, habitant une île au dur climat, et obligée de vivre d’expéditions maritimes pendant des siècles, deviendra forcément, sans éducation spéciale, entreprenante et hardie.

Ces nécessités de milieu que nous ne saurions créer pourraient être remplacées par une éducation convénable. Dirigée avec des règles sûres, elle finirait par créer des réflexes héréditaires et par modifier à la longue le caractère d’un peuple. Ainsi se justifierait le mot de Leibniz qu’avec l’éducation on changerait en un siècle la face d’un pays.

Un siècle ne suffirait probablement pas, comme le croyait l’illustre philosophe, pour créer des caractères héréditaires, mais il suffirait sûrement pour créer certaines aptitudes.