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parue. Puis il entendit parler du système des cycles ; il se précipita sur cette idée, et quelques jours après c’était la thèse qu’il soutenait ardemment[1].

La plupart des professeurs envisagent d’ailleurs avec une parfaite indifférence tous ces projets de réforme, dont ils perçoivent aisément l’inanité. M. Sabatier n’a pas hésité à le dire devant la Commission :

L’on constate que tous les essais de réforme de l’enseignement secondaire faits parallèlement ont misérablement échoué, et n’ont servi qu’à aggraver la situation de cet enseignement. Si bien que j’ai entendu plusieurs professeurs me dire : Au nom du ciel, qu’on ne fasse plus de réformes, qu’on ne change plus les programmes, qu’on n’annonce plus d’ères nouvelles[2].

Tous ces projets sont, je l’ai répété, la conséquence de l’indéracinable illusion latine qu’un peuple peut modifier à son gré ses institutions. En réalité, il ne peut pas plus choisir ses institutions que sa littérature, sa langue, ses croyances, ses arts, ou tout autre élément de civilisation. Nous avons bien des fois montré dans nos ouvrages que ces éléments sont le produit de l’âme de la race et que pour les changer il faudrait changer d’abord cette âme.

L’éducation ne saurait échapper à une loi aussi générale. Bonne ou mauvaise, elle est fille de nécessités sur lesquelles nous ne pouvons que bien peu de chose. Les réformes en bloc sont absolument sans valeur, et alors même qu’un tyran les imposerait par la force, elles ne pourraient durer, car, pour les maintenir, il faudrait réformer l’âme des professeurs, des parents et des élèves.

Tous ces pompeux projets de réforme radicale ne

  1. Enquête, t. II, p. 532. Darlu, maître de conférences.
  2. Enquête, t. I, p. 204. Sabatier, doyen de la Faculté de théologie protestante.