Page:Le Bon - Psychologie de l’Éducation.djvu/108

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

M. le Président. Ils n’allaient pas en rang, j’espère ?

M. Béjambes. En rang, dans les allées du parc. Jamais je n’ai vu les élèves aller jouer dans le parc. Il y avait des cours qui donnaient sur le parc, mais il était bien interdit aux élèves de dépasser la limite de la cour[1].

M. le Président (s’adressant à M. Plançon, proviseur du lycée Michelet). Vous n’avez pas osé prendre la responsabilité de leur laisser une certaine indépendance ?

M. Plançon. Non, d’abord pour des raisons de moralité, puis parce que nous avons la garde du parc ; il faut y éviter quelquefois des petites déprédations, et nous ne pouvons naturellement pas ne pas veiller à ce que le parc soit toujours en bon état ; nous y avons intérêt, parce que d’abord c’est une propriété de l’État que nous avons le droit de maintenir intacte et propre, et ensuite pour les familles. Nous ne pouvons pas les laisser errer seuls dans le parc.

M. le Président. On n’a jamais essayé de leur laisser un peu plus de liberté dans le parc ?

M. Plançon. Je ne crois pas que mes prédécesseurs l’aient essayé[2]

Quelque peu interloqué et supposant peut-être qu’il se trouvait en présence de cas exceptionnels, le Président s’est tourné vers M. Staub, proviseur du lycée Lakanal, et alors s’est engagé le dialogue suivant, digne, comme le précédent, d’être livré à la méditation des écrivains de l’avenir qui rédigeront l’invraisemblable histoire de l’éducation du peuple français à la fin du xixe siècle.

M. le Président. Quelle est l’étendue du parc ?

M. Staub. 10 hectares.

M. le Président. Et vous croyez qu’il y aurait des inconvénients graves à laisser les élèves jouer dans le parc ?

M. Staub. Très graves.

M. le Président. Et ces inconvénients sont de nature assez délicate pour que vous ne puissiez pas nous les dire ?

M. Staub. Nullement. Ce sont nos mœurs qui s’y opposent.

  1. Enquête, t. II, p. 416. MM. Marc Sauzet, Béjambes et Ribot.
  2. Enquête, t. I, pp. 582 et 583.