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TÊTES ET FIGURES

Il avait à peine prononcé ces odieuses paroles que l’ange avait disparu. Le malheureux se trouva plongé dans l’obscurité et la solitude les plus profondes. À cette âme qui venait de rejeter le ciel, le ciel fermait ses portes.

Bien des années s’écoulèrent, années de pauvreté, de misère et de douleurs.

Celui qui, un jour, avait eu un ange pour guide dans le sentier de la vérité, avait continué à chercher la vérité, mais ne l’avait pas trouvée.

La femme qu’il avait aimée, l’avait trahi et déserté ; ses amis l’avaient fui ; la fortune lui avait échappé. L’ancien zèle qui l’animait pour le bonheur de l’humanité ne brûlait plus dans son âme ; il était éteint. Le spectre de la faim lui apparut ; la maladie mina son corps. Affolé par le désespoir, il se mit à maudire son sort, sans s’apercevoir que lui-même, seul, était l’auteur de sa propre déchéance.

Drapé dans son égoïsme et son arrogance, il se mit à accuser Dieu d’injustice ; quant à lui-même, il ne se trouvait pas coupable.

Une nuit, défiant Dieu et son salut éternel, il eut la couardise d’abréger son existence, avec la conviction que, lorsque l’on est mort, on l’est pour longtemps, et que la mort, c’est la fin de tous les maux.