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LE NOM DANS LE BRONZE

Elle lui refait sa profession de foi ; la gloire des lettres l’attire, elle ne se mariera pas. Un jour tout le pays saura son nom. Des amitiés plus précieuses que l’amour seront son lot.

— J’aime ton frère Jean. Il me connaît, lui. Il m’appelle « Bas bleu, » discute avec moi et ne me fait jamais la cour. Il sait bien que je n’ai aucun désir de l’épouser, de demeurer à Sorel toute ma vie. Rester ici, être ensevelie vivante, en dehors du courant des idées, de tout, est-ce un destin ? Moi, mon ambition, c’est de m’en aller.

Ou bien, elle dit :

— Ne trouves-tu pas Marguerite, que la vie intellectuelle est la plus exquise chose du monde ? Moi, je voudrais tout lire, tout connaître. Lorsque je me querelle avec Jean, parce qu’il a le malheur de s’intéresser à Salavin de Georges Duhamel, et que nous avons une grande discussion, je ne peux pas être plus heureuse. Et l’avantage, c’est qu’on anesthésie ses chagrins, que l’on sait employer ses moments libres, que l’ennui n’a aucune prise… Marguerite, si jamais je semble fléchir et me pencher vers l’amour, rappelle-