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LA PLUS BELLE

malheurs dépendent de nos antécédents. Elles avaient de bons parents, elles avaient été bien élevées, leur conscience ne leur reprochait pas grand chose, rien de terrible ne devrait leur échoir. Claire, au contraire, accusait Dieu de cruauté, ne comprenait pas pourquoi tant de souffrances sévissaient partout. Elle succombait à des velléités de révolte. Lucette, qui comme Nicole, tenait de sa mère une religion comportant la patience, l’endoctrinait : le monde était malheureux parce qu’il agissait avec inconséquence, avec égoïsme ; les parents multipliaient les fautes, les enfants forcément les expiaient. En se conduisant avec sagesse, en ne redoutant pas les sacrifices, les pénitences, en priant pour réparer le mal commis par les autres, on améliorerait la vie. Elle empruntait cette philosophie au cours de science sociale qu’elle suivait. — Puisqu’elles n’étaient pas matérialistes, qu’elles se piquaient de vivre avec leur intelligence, leur cœur, leur âme, puisque, enfin, elles avaient de l’idéal, — c’était alors le mot consacré, à la mode. — elles seraient heureuses.

Claire parfois objectait :

— Il y a des gens qui sont bons et qui subissent les pires catastrophes.

Ce qui n’embarrassait aucunement Lucette. Elle assurait :

— C’est apparemment ainsi, mais on ne sait jamais. Des choses surviennent qui sont consi-