Page:LeNormand - Couleur du temps, 1919.djvu/9

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il a neigé


Il a neigé et j’ai marché dans la rue blanche. Le ciel était gris-pâle ; le soleil se dessinait en boule, sans rayons ; la lumière était douce, comme voilée de fine gaze ; des flocons légers tombaient encore, lentement. L’air frappait les joues et je sentais du rose sur mon visage. En mon âme, j’avais aussi des rêves blancs, des fleurs de joie.

La belle neige immaculée et neuve, la neige froide, quelle chaleur intense jetait-elle dans mon cœur ? Le soleil faible, sans lueur, quelle clarté faisait-il donc en mon esprit ? Les mêmes peines qu’hier eussent dû m’attrister et les mêmes préoccupations, m’inquiéter ? Pourquoi avais-je confiance, pourquoi étais-je gaie quand le ciel au-dessus de moi s’étendait en grisaille ?

Miracle de la neige, de la belle neige blanche, de la neige qui vient vers la terre ainsi qu’une purification et qui voltigeait devant mes yeux. Elle descend du ciel, la neige. Elle descend de même qu’une manne, ou qu’une pluie de grâces. Elle arrive de l’inconnu, du pays bleu…

J’allais les mains jointes dans mon manchon. Le vent battait mes joues. Je regardais la rue. J’écoutais, tous les bruits me paraissaient joyeux,

7