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Le « Docteur »


Parce que, toujours aux maux qu’elle découvre ou dont on se plaint devant elle, elle indique les remèdes sûrs, dans le village on l’appelle le « docteur ».

C’est une vieille demoiselle dévote. Au fond, elle est à peu près sainte, peut-être même tout à fait sainte. Mais comme c’est une routinière invétérée et qu’elle a l’apparence d’une maniaque, la risée nécessairement l’atteint, surtout dans un coin de campagne tranquille, où aucun travers ne passe inaperçu ; surtout dans les rues étroites d’un village où chaque maison a des yeux aux fenêtres, où les langues, malicieuses par désœuvrement, maltraitent le prochain aussi naturellement qu’elles parlent. N’est-ce pas une espèce de caractère propre aux esprits inoccupés, que cette méchanceté inconsciente qui n’est sans doute que peu coupable, mais qui, hélas ! n’est point inoffensive ?

Sans voir et sans entendre pourtant, le « docteur », à des heures fixes, bien paisiblement chemine sur les trottoirs qui longent les maisons. Humblement elle accomplit sa mission : distribuer des « messagers du Sacré-Cœur », quêter