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Les quais


Les quais de la vieille ville s’allongent et forment une équerre au confluent de la petite rivière qui rejoint le grand fleuve ; et comme dans la chanson, la houle en silence, le long de ces quais, incline les vaisseaux.

Allez vous y promener à l’heure où le soleil se couche, à l’heure où, de l’autre côté du fleuve, il descend au-delà d’une île verte dont les maisons blanches et claires ont l’air de sourire dans des bouquets d’arbres ; sur le fleuve lisse, aux jours de calme, la boule rose du soleil se mire, et son reflet s’étend, de même qu’une colonne lumineuse, dans l’eau où passent mille nuances fines et rares, comme les nuances dont sont remplis les contes de fées.

Mais ces quais ne sont point une promenade à la mode ; les planches en sont inégales et parfois trouées ; ces quais ne sont point libres et propres comme une terrasse soignée ; de distance en distance, sur leur surface raboteuse s’en vont, comme des pions sur un jeu de parchési, de trapus petits poteaux de fer où s’accrochent les câbles qui tiennent en repos remorqueurs, barges, ou blancs bateaux luxueux aux innom-