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AUTOUR DE LA MAISON

On priait bien, malgré tout. On égrenait les ave Maria en faisant siller les sons entre les dents. On lisait les prières de la Messe avec le même bruissement, en se balançant en cadence. Vous savez la manière des petites filles de couvent ? On pouvait prier du cœur, mais on priait surtout des lèvres. Le bon Dieu voyait sûrement les bonnes intentions, et Il devait appeler les anges pour leur faire regarder cette enfance qui s’efforçait d’être sérieuse devant la gravité de la cérémonie.

Et on allait recevoir les cendres. On relevait les casques de poil en se rendant aux balustres, afin que le prêtre pût atteindre les cheveux. On se coudoyait avec des yeux brillants qui souriaient pendant que la bouche restait pincée !

On redescendait l’allée en se touchant le front pour constater que la cendre y était. Une petite, n’ayant pas assez repoussé son bonnet, se tournait vers nous, et disait, l’air scandalisé : « Il me l’a mis sur ma capine ! »

L’office terminé, on sortait de l’église et l’on avait congé pour le reste de l’avant-midi. Graves pensées de mort, où alliez-vous ! On se dispersait en criant de joie. Le soleil nous illuminait l’âme, et nous étions contentes : contentes du beau jour, fières d’être libres, et si heureuses en pensant que le printemps