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lui offrir un spectacle récréatif : le vol du Faisan, de la Perdrix, du Canard sauvage, était, disait-on, plaisir de gentilhomme ; mais ce qu’on nommait plaisir de prince, c’était le vol du Milan, du Héron, de la Corneille et de la Pie, véritable gibier de luxe, sans aucune valeur culinaire. Le vol du Milan était le plus rare de tous. La première difficulté à vaincre était de le faire descendre des hautes régions de l’atmosphère, où le Faucon lui-même n’aurait pu l’atteindre ; pour cela on prenait un Grand Hibou ou Duc ; on affublait ce Duc d’une queue de Renard pour le rendre plus remarquable, et on le laissait ainsi, dans une prairie, voltiger à fleur de terre. Bientôt le Milan, planant dans la nue pour guetter une proie, distinguait de sa vue perçante un objet bizarre, s’agitant sur le sol ; il descendait pour l’examiner de plus près ; aussitôt on lançait sur lui un Faucon qui, dès l’abord s’élevait au-dessus du Milan, pour fondre sur lui verticalement ; alors commençait un combat, ou plutôt des évolutions de l’intérêt le plus varié ; le Milan, fin voilier, fuyait devant le Faucon en s’élevant, s’abaissant, croisant brusquement sa route, et prenant, à angle aigu, les directions les plus imprévues ; le Faucon non moins agile que lui, mais plus courageux, et en outre stimulé par la faim, le poursuivait avec ardeur dans ces mille évolutions : il le saisissait enfin et l’apportait à son maître.

« Le vol du Héron et de la Grue était non moins amusant pour le spectateur, et plus dangereux pour le Faucon : l’oiseau poursuivi se laissait plus facilement atteindre, mais il se défendait avec plus de courage, et l’assaillant recevait quelquefois de sa victime des blessures auxquelles il ne survivait pas longtemps. On employait même le Faucon, et surtout le Gerfaut, à la chasse du Lièvre ; on faisait d’abord partir celui-ci au moyen d’un limier : puis le Faucon, lancé à l’avance, et volant au-dessus de la plaine, apercevait le Lièvre et tombait sur lui.

« Mais de tous les vols, le plus amusant, le plus