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de l’eau sain et sauf et échapper ainsi aux serres de son ennemi. Quelquefois même ce rapace est vaincu par des oiseaux moins puissants que lui, dans lesquels il attaque des rivaux ou une proie : M. Gerard a vu un Corbeau tuer un Faucon d’un coup de bec qui lui fendit le crâne.

Le Faucon, à défaut d’autre pâture, se nourrit d’alouettes, de pleuviers, et de corbigeaux, sans refuser dans les temps de disette, le poisson mort. La hardiesse est la note caractéristique du Faucon : on le voit poursuivre sa proie sous le fusil du chasseur, et souvent payer de sa vie cette insolente agression. Voici un fait intéressant rapporté par un naturaliste français, M. Gerbe.

« Il y a quelques années, un faucon pèlerin était venu s’établir, en septembre, sur les tours de la cathédrale de Paris. Pendant plus d’un mois qu’il y demeura, il faisait tous les jours capture de quelques-uns de ces pigeons que l’on voit voltiger çà et là au dessus des maisons. Lorsqu’il apercevait une bande de ces oiseaux, il quittait son observatoire, rasant les toits ou gagnant le haut des airs, puis fondant sur la bande, et s’attachant à un seul individu qu’il poursuivait avec une audace inouïe, quelquefois à travers les rues des quartiers les plus populeux. Rarement il retournait à son poste sans emporter dans ses serres une proie, qu’il dépeçait tranquillement, et sans paraître affecté des cris que poussaient contre lui les enfants. Il chassait le plus habilement le soir, entre quatre et cinq heures, quelquefois dans la matinée ; tout le reste de la journée il se tenait tranquille. Les amateurs, aux dépens de qui vivait ce faucon, finirent par ne plus laisser sortir leurs pigeons, ce qui, probablement, contribua à l’éloigner d’un lieu où la vie était pour lui si facile. »

Ces oiseaux jouissent d’une étonnante longévité ; on prit, il y a une cinquantaine d’années, au Cap de Bonne-Espérance, un Faucon portant un collier d’or sur lequel était gravé qu’en 1610 cet oiseau