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dans le fleuve sacré de la patrie. Restauré, vivifié d’un souffle nouveau, vous cherchez l’ombre d’une de ces grottes pittoresques, taillées dans le roc, si communes en cet endroit ; votre regard scrute au loin l’horizon. En face de vous sur la côte Sud du St. Laurent, les populeux villages de St. Denis, de Kamouraska, de la Rivière Ouelle se groupent autour de l’église paroissiale ; à l’est, le cours du grand fleuve se prolonge à perte de vue ; au nord de votre poste d’observation, la rive irrégulière de la Baie se courbe en amphithéâtre, frangée d’un cordon de jolies demeures, où s’écoule en paix l’existence d’une nombreuse postérité canadienne-française, portant en grande partie des noms écossais.[1] Entourées de parcs et de grands bâtiments, il vous est facile de distinguer de chaque côté de la baie les massives résidences des seigneurs. De hautes forêts de pins, d’érables, d’épinettes, entrecoupées de clairières, abritent les flancs des montagnes : leur verdure contraste agréablement d’un côté avec l’âpre majesté du paysage et les énormes rochers entassés les uns par-dessus les autres et de l’autre, avec les blanches habitations de la Baie.

Votre œil attentif saisit successivement le contour de ces singuliers mamelons, que l’on a voulu faire passer pendant longtemps pour les tombeaux des aborigènes, jadis rois de ces contrées, tandis que ce ne sont vraisemblablement que des accidents du sol, résultant des bouleversements nombreux opérés par le grand tremblement de terre de 1663 sous l’effet duquel[2] « les clochers des églises (mirabile visu) se pliaient jusqu’à terre, puis se relevaient. »

Regardez à l’entrée de la Baie ; que voyez-vous sur ces vastes sables que la marée montante va bientôt ensevelir dans ses replis ? Sont-ce ces mêmes marsouins blancs, se reposant après les innombrables bascules qu’ils ont faites dans les flots ; ou bien est-ce un

  1. Les descendants de Fraser’s Highlanders.
  2. Relations des Jésuites.