Page:LeMoine - Ornithologie du Canada, 1ère partie, 1861.djvu/342

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

geuses. Il n’y a de controuvé ici que le procédé du caillou.

« Ayant observé que les grues avaient emprunté aux guerriers l’habitude de disposer des sentinelles la nuit autour du camp qu’elles ont choisi pour pâturer et dormir, les mêmes Grecs ont également éprouvé le besoin de faire intervenir un second caillou dans l’histoire. Bien que la nouvelle fable ne soit qu’une variante de la première, elle a eu plus de succès encore, tant de succès que la grue est devenue du fait l’emblème officiel de la vigilance, et que la corporation des typographes a fini par l’adopter pour attribut.

« J’ai dit l’histoire, voici le conte. Il arriva une nuit que par le défaut de vigilance d’une sentinelle qui s’était endormie, un ennemi féroce qu’on suppose être un renard, s’introduisit dans le camp et y moissonna largement pour le compte de la mort. Alors, pour prévenir le retour d’un semblable désastre, il fut décidé qu’à l’avenir les sentinelles seraient obligées de se tenir sur une seule patte et d’avoir un caillou dans l’autre pour que la chute de ce corps les réveillât lorsqu’elles seraient sur le point de succomber au sommeil. Et depuis ce jour-là le signe hiéroglyphique de la vigilance fut une grue en faction tenant en sa patte un caillou. Il y a tel Elzévir à la grue qui vaut aujourd’hui des sommes folles.

« Au surplus, ce n’est pas d’hier que datent les bons rapports des grues et des lettrés. Une opinion vieille comme le monde ou comme le jeu d’échecs, veut que ce soient ces bêtes qui aient soufflé à Palamède l’invention de la lettre V (n grec) et celle de la lettre Y (upsilon), qui représentent toutes deux l’angle aigu que les grues décrivent dans leur vol. De là le nom de l’oiseau de Palamède décerné à la grue. »



LE BUTOR D’AMÉRIQUE.[1]
(American Bittern.)


Le Butor d’Amérique est un oiseau plus nocturne que diurne. « Le Héron fréquente de préférence les gués des fleuves, les plages découvertes et les plaines où l’ennemi se voit de loin ; le Butor se plaît au contraire au plus épais des fourrés de roseaux, où il se tient caché tout le jour, » attendant pour partir que le chasseur ou son chien lui marche sur le corps.

  1. No. 492. — Botaurus lentiginosus. — Baird.
    Ardea lentiginosa.Audubon.