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que soir le perron pour venir m’écouter quand je joue du piano. Lorsque j’ai terminé, je le prends délicatement avec les pincettes pour le mettre dehors, bien sûre de le voir revenir le lendemain. — Maintenant qu’il fait froid, mon grillon (elle a aussi un grillon) se cache dans les plis des rideaux ; mais il en sort le soir pour venir sous la table chercher le pain et les noix que j’épluche pour lui. Les mœurs, les singularités de toutes ces bêtes m’intéressent au dernier point. J’emploie mes heures de repos à les observer ; elles me délassent de mes études sérieuses, et c’est par elles que je reviens à l’humanité… »

Revenant aux oiseaux, à ses chers petits oiseaux, non pas ceux qu’elle tient en cage, mais ceux-là bien plus heureux qui jouissent de la liberté, Mme de Tracy se plaît à les suivre aux tendres jours de la couvée, suspendant leurs nids à des rameaux flexibles qui cèdent au moindre vent. La mère prudente, comme l’a dit gracieusement le poëte Delille,

Les suspend aux rameaux noblement balancés,
Et dans ce doux hamac les enfants sont bercés.

Le dilettantisme ornithologique de Mme de Tracy s’étend quelquefois aux hommes, mais aux hommes qui parlent bien des oiseaux et qui agissent de même à leur égard. Il y a surtout un ancien, un sage d’Orient, Sath, qu’elle estime et distingue entre tous les autres. C’est peut-être parce que ce sage a dit :

« Au printemps, quand les oiseaux commencent à chanter, ils s’écrient dans leur langage mélodieux : “Ah ! que les femmes sont jolies !

Et voilà les femmes pardonnées.” »

Comment parler du printemps et de ses chantres ailés sans parler des hirondelles. Anathème à Cicéron qui médit un jour des hirondelles. Mais saint François d’Assise les a bien vengées : « Chantez, chantez, mes sœurs, leur disait-il, priez avec moi le Seigneur. »