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s’élever vers l’auteur d’une telle merveille ! Car si Dieu n’a pas doté tous les hommes du génie qui crée à son exemple, il ne refuse à aucun le don d’admiration. Quand le soleil ramène le printemps, et fait éclore par milliers les germes du règne végétal, alors apparaît le petit Oiseau-Mouche, se jetant çà et là porté sur ses ailes de fée ; il inspecte avec soin chaque fleur épanouie, il en retire les insectes qui s’y étaient introduits, de même qu’un fleuriste diligent veille sur sa plante chérie, pour la délivrer des ennemis intérieurs qui pourraient altérer le tissu délicat de ses pétales. On le voit suspendu dans les airs, qu’il frappe d’un frémissement si rapide, que son vol simule une complète immobilité : il plonge un regard scrutateur dans les recoins les plus cachés des corolles, et, par les mouvements légers de ses plumes, il semble, éventail vivant, rafraîchir la fleur qu’il contemple ; il produit en même temps au-dessus d’elle un murmure doux et sonore, bien propre à assoupir les insectes qui y sont occupés à butiner. Tout à coup, il enfonce dans la corolle son bec long et menu ; sa langue molle, fourchue et enduite d’une salive glutineuse, s’allonge délicatement, et va toucher l’insecte, qu’elle ramène aussitôt avec elle dans le gosier de l’oiseau. Cette manœuvre s’exécute en un clin-d’œil et ne coûte à la fleur qu’une gouttelette de nectar, enlevée en même temps que le petit scarabée ; larcin qui n’appauvrit pas la plante, et la délivre d’un parasite nuisible.

« Les prés, les vergers, les champs et les forêts sont tour-à-tour visités par l’Oiseau-Mouche, et partout il trouve plaisir et nourriture. Sa gorge est au-dessus de toute description : c’est tantôt l’éclat mobile du feu, tantôt le noir profond du velours ; son corps qui brille en dessus d’un vert doré, traverse l’espace avec la même vitesse de l’éclair, et tombe sur chaque fleur comme un rayon de lumière. Il se relève, se précipite, puis revient, monte ou descend, toujours par bonds aussi brusques que rapides… C’est ainsi qu’il nous apparaît dans les