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LES RUES DE QUÉBEC.

Québec, qu’ils se ruaient comme des possédés sur les barrières (il y en avait trois) dans la rue des Chiens et dans la rue Sault-au-Matelot : « chacun, dit Sanguinet, portant une feuille de papier sur le chef, sur laquelle était écrit Mors aut Victoria, la mort ou la victoire. » Il y a de cela, cent ans.

De nombreux cadavres jonchaient les environs : on les transportait au Séminaire. Vous trouverez d’amples détails sur cette glorieuse journée dans l’Album du Touriste. On croit que la première barrière était au bas de la demi-lune en pierre où repose maintenant un canon sur les remparts ; la seconde était en arrière des bureaux de M. W. Campbell, N. P., et la troisième près des bureaux de la Banque Nationale, dans la rue Sault-au-Matelot.

Cette rue a vu naître l’Archevêque Signaï, dans une maison plus tard occupée par le nommé Gringras, meublier, vis-à-vis des bureaux de l’Assurance de Québec.

La rue Sault-au-Matelot a perdu toute son allure militaire d’alors. À part les bureaux de M. Ledroit, du Chronicle, des mesureurs de bois (cullers), elle semble affectée à des charretiers et à la nombreuse tribu des tonneliers, dont les futailles à certains jours couvrent les trottoirs. Il serait à désirer que la municipalité entrât en arrangement avec ces honnêtes industriels pour savoir à quel taux ils consentiraient à laisser la voie publique libre aux passants.

La rue Sault-au-Matelot ne paraît pas sur le plan de Québec de 1660, reproduit par l’abbé Faillon.

Ce quartier de la Basse-Ville, si populeux sous le régime français et où, selon M. de Laval, il y avait « grand nombre de citoyens, » en 1661, continua jusque vers 1832 à être, par le tohu-bohu des affaires et les résidences des principaux négociants, une des plus riches portions de la cité. En 1793, le père de notre Souveraine, en garnison à Québec, Colonel du 7e régiment, y acceptait l’hospitalité de M. Lymburner, un des négociants les plus huppés de l’époque. La chère amie, qui vécut comme son épouse avec lui pendant vingt-huit ans, l’élégante baronne de Saint-Laurent, était-elle de la partie ? C’est ce qu’il nous a été impossible de constater