Page:LeMoine - Histoire des fortifications et des rues de Québec, 1875.djvu/41

Cette page a été validée par deux contributeurs.
39
LES RUES DE QUÉBEC.

expédier la concession pure et simple de ce lieu pour l’érection d’une église, que le digne évêque bâtit avec le temps sous le nom de Notre-Dame de la Victoire. » Le débarcadère des petites embarcations, en aval de la vieille halle (maintenant le marché Finlay)[1] a sans doute emprunté son nom La Place du Débarquement, du site avoisinant, en face de l’église Notre-Dame, connue comme La place de Notre-Dame.

C’est dans ces environs, un peu vers l’ouest, qu’avait lieu en juillet 1608, sous l’ombre discret d’un bois, près du jardin que Champlain s’y faisait « accommoder », l’historique entrevue qui sauva la colonie. Le secret en valait la peine : rien de surprenant si le loyal pilote de Champlain, le capitaine Testu, jugea à propos de conduire le fondateur de Québec à l’écart dans un bois avoisinant pour lui dévoiler l’odieuse trame qu’un des complices, Antoine Natel, serrurier, venait de lui confier sous le plus grand secret. Le chef de la conspiration était un nommé Jean du Val, venu en ce pays avec Champlain. On devait égorger Champlain, piller le magasin, puis rejoindre les vaisseaux espagnols et basques à Tadoussac. Comme il n’y avait alors dans la Nouvelle-France ni cour d’appel, qu’il n’était nullement question d’une Cour Suprême, le procès du chef de la conspiration fut bientôt instruit ; le sieur Jean du Val fut bel et bien « pendu et étranglé au dit Québecq, et sa tête mise au bout d’une pique, pour êstre plantée au lieu le plus éminent du fort. » Certes, cette livide tête de forcené, au bout d’une pique, près de la rue Notre-Dame, devait faire un effet pittoresque à la brunante.

Mais le brave capitaine Testu, le sauveur de Champlain et de Québec, qu’est-il devenu ? Champlain lui fait l’honneur de le nommer, voilà tout. Ni monument, ni poème, ni page d’histoire, rien pour commémorer son dévouement. À l’instar de celle de l’homme illustre dont il sauva les jours, sa tombe est ignorée. Il n’existe personne de sa descendance, d’après l’abbé Tanguay.

  1. M. Finlay, un des bienfaiteurs de la cité, laissa des dons que la ville employa à acheter ce marché.