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LES RUES DE QUÉBEC.

à la population affamée de Québec en 1758. Le peuple nommait la Maison, La Friponne. Près du site de l’ancienne brasserie de Talon, où Frontenac avait interné l’abbé de Fénélon[1], en attendant son procès, s’élève maintenant la brasserie de M. Boswell. Aux yeux des « libres et indépendants électeurs » de la Vacherie, au siècle dernier, nul doute que le palais de l’Intendant ne semblât une huitième merveille. La capitulation du 18 septembre 1759, enleva vraisemblablement une noble partie de sa splendeur à la huitième merveille, qui subit une éclipse totale lorsque les boulets des milices canadiennes, en 1775-6, en délogeaient les envahisseurs du sol, les sans-culottes d’Arnold, comme le colonel Caldwell l’écrivait en 1776 à son ancien chef, le général Murray. On appelait la Vacherie les vastes pâturages au pied du côteau Sainte-Geneviève, où paissaient en été les vaches de la cité, et où maintenant se groupent tant d’orgueilleux magasins, sur les rues des Fossés, Craig, de la Couronne, etc.

Si la rue Saint-Pierre eût eu, en 1775, pour voie de communication régulière avec cette « seconde Basse-Ville » la rue Saint-Paul (ouverte en 1816) nul doute que le soleil du progrès n’y eût luit près d’un demi-siècle plus tôt.

« Quelques projets d’amélioration, dit l’abbé Ferland, pour la ville de Québec, furent proposés au ministre par M. de Meulles. Depuis assez longtemps l’on reconnaissait la nécessité d’obtenir un local pour la demeure de l’intendant et pour la tenue des séances du conseil, le château Saint-Louis fournissant à peine un logement convenable au gouverneur et à ceux qui composaient sa maison. M. de Meulles proposa d’acheter un grand édifice de pierre que M. Talon avait fait bâtir pour servir de brasserie, et qui, depuis plusieurs années, était resté inoccupé. Placé dans une position

  1. L’abbé de Fénélon, en Août 1674, étant interné à la brasserie de Talon, sous la garde d’un huissier à la suite de son fameux sermon de Pâques de cette année-là contre les corvées extraordinaires commandées par M. de Frontenac. Il niait au Conseil le droit de le juger et parut devant la Cour, le chapeau sur la tête. (Voir Histoire de la Colonie Française au Canada. Vol. III, pages 315-496.