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LES RUES DE QUÉBEC.

d’un instrument à cordes et de l’orgue qui ajoutaient beaucoup à l’harmonie et à la douceur du chant. Quand le roi eut repris le Canada, il fut question de fortifier la ville de Québec, qui comptait alors soixante-dix maisons. Comme la Haute-Ville était établie sur un rocher, formant une sorte de triangle, environné des deux côtés par les eaux du fleuve Saint-Laurent, on conçut le projet de la fermer par un mur d’enceinte avec de gros bastions, du côté où elle n’était pas défendue par l’élévation de son assiette et par l’eau, et de faire à ce mur trois portes pour la commodité des particuliers. On se proposait aussi de fortifier la Basse-Ville, en ajoutant à la plate-forme deux bastions avancés, d’où l’on pût battre les navires sur le fleuve Saint-Laurent. »[1]

L’auteur des « Anciens Canadiens » a fait ressortir d’une manière frappante le contraste entre 1757 et 1857 pour ce même local — en 1857 nous avions encore les troupes de Sa Majesté Britannique. « C’est toujours, dit-il, la même cathédrale pour la structure, minus sa tour moderne, qui semble supplier les âmes charitables, soit de l’exhausser, soit de couper la tête à sa sœur géante, qui a l’air de la regarder sous cape, avec mépris, du haut de sa grandeur.

Le collège des Jésuites, métamorphosé maintenant en caserne, présentait bien le même aspect qu’aujourd’hui ; mais qu’est devenue l’église construite jadis à la place des halles actuelles ? où est le bocage d’arbres séculaires, derrière ce temple, qui ornait la cour maintenant si nue, si déserte, de cette maison consacrée à l’éducation de la jeunesse canadienne ? La hache et le temps, hélas ! ont fait leur œuvre de destruction. Aux joyeux ébats, aux saillies spirituelles des jeunes élèves, aux pas graves des professeurs, qui s’y promenaient pour se délasser d’études profondes, aux entretiens de haute philosophie, ont succédé le cliquetis des armes, les propos de corps-de-garde, souvent libres et saugrenus. À la place du marché actuel, des boucheries très-basses, contenant tout au plus sept à huit étaux occupaient une partie du

  1. Histoire de la Colonie Française au Canada, tome III, p. 371-73.