Page:LeMoine - Chasse et pêche au Canada, 1887.djvu/72

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

duit à sa perte. Le chasseur expose, dans le devant de son canot, sur la lisière du lac, une torche d’écorce enflammée ; le chevreuil allant s’abreuver, s’arrête, s’approche, fixe l’objet : une balle l’atteint. On le leurre également au moyen d’une bougie ardente, fixée à l’intérieur de la cavité d’un bonnet d’écorce de bouleau, qui dérobe la figure de celui qui le porte ; les yeux du cerf reluisent dans l’obscurité comme des globes de feu, — points de mire pour le chasseur qui peut difficilement manquer le cible.

Dans les États du Sud, où le cerf fréquente de vastes plaines[1] on le pourchasse à cheval avec des lévriers

  1. « Il vient de se produire un incident curieux sur la ligne du chemin de fer du Pacifique, à l’endroit où les premières ondulations du terrain, au sortir des prairies annoncent le voisinage des Montagnes-Noires, dans l’Amérique du Nord.

    « Au point du jour, » raconte le Matin, « la locomotive entraînant une longue file de wagons, chargés de voyageurs et de colis, pénétrait dans une petite vallée où coule doucement une eau pure et fraîche venue de la montagne.

    « Sur les bords de ce ruisseau se tenait un nombreux troupeau de cerfs s’y désaltérant avec délices, loin de tout danger apparent. Les timides animaux, épouvantés par l’apparition de ce cheval de fer au milieu d’eux, s’élancèrent pour se dérober par une course furieuse à cet ennemi inconnu.

    « Le mécanicien, voulant ajouter à leur effroi, fit entendre le sifflement aigu et strident de ses jets de vapeur. C’en était trop pour les pauvres bêtes : toutes, afin d’échapper au monstre qui les menaçait et semblait suivi d’une armée, s’enfuirent dans la direction même que suivait le train.

    « La lutte commença entre la locomotive et les cerfs.

    « Lancée à toute vapeur, la formidable machine, dont les roues tournaient avec une rapidité vertigineuse, semblait dévorer l’espace, mais les cerfs, à qui la frayeur donnait vraiment des ailes, touchaient à peine la terre et fendaient l’air avec des élans désespérés.

    « Fer et vapeur contre poumons et muscles, qui l’emporterait ? Le mécanicien chauffa à la plus haute pression, aux hourras des voyageurs qu’intéressait vivement ce singulier steeple-chase.

    « On estime que sur un parcours de plus de six milles (près de 10 kilo-