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connaître au parfait, la tanière de chaque blaireau du canton. Je pouvais identifier à première vue, chaque écureuil, tous les suisses du voisinage ; le tronc d’arbre renversé où le Tetras venait à l’aube, faire l’appel à ses sultanes, le nid de corneille en mai, l’arbre creux en octobre, où une marmotte avait établi sa demeure. En juin, j’écoutais les cailles et les perdrix appelant amoureusement leurs compagnes et je savais où trouver les jeunes après l’éclosion. J’avais toutes espèces de favoris : des écureuils apprivoisés, des corneilles, des éperviers, des hiboux, dociles à ma voix ; des blaireaux, pour familiers. La basse-cour comptait pour moi bien des groupes amis. Je faisais le trajet des pâturages aux étables, perché sur le dos des bêtes de ferme. Je m’étais un jour hasardé à conduire à la fois en laisse quatre poulains indomptés. J’avais fait sauter du pont, dans la rivière, ma monture, — un ânon que nous avions, — au grand risque de me rompre l’épine dorsale. J’avais dressé une génisse, à me permettre d’appuyer sur les rudiments de ses jeunes cornes, mon fusil, pour viser plus sûrement. Quant à la pêche, j’en raffolais.

Il y avait au fond des solitudes forestières, de grands lacs, ayant à leur décharge des moulins et des écluses où fourmillait le brochet. Il y avait aussi, ô bonheur suprême ! de limpides cours d’eau, s’élançant allègrement de la cime des monts ; leur fracas, leurs ondes écumeuses semblaient me redonner une existence nouvelle, une exubérance de vie. »

Ne soyons pas surpris si pour cet enfant terrible, il fallait un champ convenable à son activité dévorante ; et qu’il l’ait trouvé, dans les scènes émouvantes de la pêche.

Frederick Tolfrey

The Sportsman in Canada by Frederick Tolfrey, au-