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Il y a cinquante ans, le saumon pris dans ces rivières, ou à leur estuaire, était salé, encaqué, vendu aux commerçants, ou expédié à Halifax ; les Indiens y étaient pour une moitié, dans ce poisson, pris au nigogue. Pas de lois de pêche en ces temps là, pour restreindre le barrage des rivières au moyen de rets. On tendait pour le saumon dans l’estuaire de la Ristigouche, plus haut que Dalhousie ; on ne comptait pas au delà de trente cinq stations de pêche au rets dans les comtés de Ristigouche et de Bonaventure. Le prix du saumon par quart : $6 à $8, offrait un trop faible encouragement ; les pêcheurs établis sûr les rives, se bornaient à capturer ce qui suffisait pour leur provision d’hiver seulement.

Jeune garçon, en 1837, je me rappelle l’état des choses d’alors ; les anciens se plaisaient à contraster la capture actuelle, avec les pêches merveilleuses de leur jeunesse.

De 1837, à 1857, la pêche au saumon fut incertaine, précaire même ; les meilleures années ont donné un rendement de cinquante quarts… Vers 1864, le département des Pêcheries, mit en force la législation obtenue pour protéger cette industrie ; quelques amateurs de pêche à la ligne accoururent, principalement les officiers du 78e régiment (Fraser’s Highlanders, en garnison à Québec). On proscrivit le nigogue ; on limita l’aborigène à certaines réserves de pêche, d’abord ; puis, on le mit sur le même pied que les blancs ; le saumon revint. En 1871, on adopta le mode de louer à bail, les rivières à saumon. Les nouveaux détenteurs se firent fort de protéger leur propriété ; on restreignit le temps et les lieux pour tendre les rets ; le poisson pût remonter les cours d’eau ; les stations de pêches devinrent de valeur, se multiplièrent rapidement. Comme surintendant, je fus appelé à faire rapport sur quarante nouvelles demandes de permis, en une seule saison.