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habileté comme chasseur. Il se récria d’abord, mais enfin, il endossa le précieux paquet et nous nous mîmes en marche. Je me répétais à moi-même : « Tu t’en rappelleras de ton castor ! » Nous avions à peine fait un mille de marche, que je notai chez le baron, divers trémoussements d’épaules. Il se plaignait d’une excessive chaleur dans le dos. « Ça te chauffera encore plus bientôt » ! pensai-je.

Plus tard, ayant à traverser un ruisseau sur un tronc d’arbre renversé en guise de pont, le baron se mit à crier, quelque chose l’écorchait au vif ! et ne pouvant plus y tenir, à peine eut-il atteint la rive opposée, qu’il délia les courroies qui assujettissaient le castor et lâcha le paquet sur le gazon, ajoutant qu’il avait le dos en feu. C’étaient les aspics, ou poils du porc-épic, qui avaient, comme je m’y attendais, pénétré même à travers le capot de cuir et qui s’étaient enfoncés dans ses chairs.

Il jura alors comme un païen, voua à tous les diables, le Canada, et les êtres malfaisants qu’il contenait. Puis, il alla se rafraîchir le front dans le ruisseau ; je lui appliquai des synapismes de mousse humide et froide, au dos ; peu à peu, il se calma.

Nous reprîmes le sentier du camp ; comme la brunante commençait à se faire, je ne fus pas du tout surpris de rencontrer sur la lisière du bois, un petit animal nocturne, qui sait se faire sentir de loin. — Mephitis Americana.

— De grâce ! dit le baron, voici un superbe blaireau, tel que ceux que j’allais chasser dans les Pyrénées !

Je saisis de suite Caffé, au collet, pour l’empêcher d’attaquer le susdit blaireau. Le baron tira, mais de loin, craignant de manquer une aussi belle pièce ; il courut pour donner le coup de grâce à la bête avec la crosse de son fusil ; s’étant baissé, il reçut en pleine figure une rosée qui le fit tressaillir. Moi, je ne savais où me mettre, pour dissi-