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ainsi les voir tomber, comme une grosse bordée de neige grise, sur les Battures aux alouettes, à l’entrée du Saguenay ; sur les Bancs de Portneuf, vis-à-vis de Rimouski ; sur la Batture de Manicouagan, et autres endroits où leurs essaims sans nombre semblent se donner rendez-vous, à la fin d’août, chaque année.

C’est de ces chefs-lieux de réunion qu’elles se répandent par bandes moins considérables, bien que nombreuses encore, sur tous les rivages de notre grand fleuve.

Le soleil est déjà visible à l’horizon, l’air est frais, le temps calme ; nous voici qui arpentons la grève de la pointe sud-est de l’île-aux-Grues.[1]

— Mais avant d’aller plus loin, d’où vient ce nom, demande un des interlocuteurs ?

— C’est tout simple

« Du temps que la Reine Berthe filait » pas précisément, mais vers l’époque où M. de Montmagny chassait… long-temps après… et même de nos jours, l’oiseau-voyageur, chanté par Horace, ce rêveur des marais, y faisait étape et, pourtant, l’oiseau mélancolique n’est pas de nos endroits : les vastes prairies du sud-ouest le réclame pendant l’hiver ; l’été, il va confier ses pudiques amours aux savanes, aux îles solitaires et aux paisibles lacs des pays du Nord.

— Si c’était des grands hérons bleus au lieu de grues… les amis de Wilson, au lieu des vengeurs d’Ibycus…[2] que diriez-vous ?

  1. L’Île-aux-Grues est désignée sur les cartes anglaises comme Crane Island ; ce qui semble expliquer la singulière traduction qu’en fait un touriste lettré de nos jours qui évidemment n’était pas chasseur, en la transformant en Île-aux-Crânes.
  2. Ou trouvera l’épisode de la mort d’Ibycus relatée dans l’Ornithologie du Canada, page 323.