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faisait un calme plat : le soleil, de ses rayons vermeils, inondait les cimes lointaines et bleuâtres des Laurentides ; le long de la côte du sud, quelques banquises, résidu de la débâcle du lac St-Pierre, étaient entraînées par la marée montante ; c’était le jour de la saint George, le 23 avril. Nous attachâmes nos plans, en vue du fleuve et nous nous embusquâmes derrière une grosse glace, que la marée avait échouée sur la batture, nos fusils chargés de gros plomb à outarde.

Bientôt, attirées par la réclame de nos outardes domestiques, deux sauvagesses, comme les nommait mon canotier, quittèrent le camp et s’avancèrent en nageant ; mon coup de fusil blessa mortellement le jars. Gaspé se plongea dans l’onde glacée, repêcha et nous rapporta fièrement cette belle pièce.

Évidement le temps était trop beau, beaucoup plus favorable à la confection du sucre d’érable en avril qu’à la chasse à cette saison.

Nous dînâmes, sur l’île, à l’endroit connu comme la butte à Chatigny : puis, prenant avantage de la marée montante et du vent, la Blanche Diane, tira sa bordée, d’abord vers le Cap Tourmente ; et virant de bord, elle cingla pour la côte sud, vers l’anse-à-Giles ; nous laissâmes échouer la chaloupe et nous trouvâmes, chez l’hôtelier, Simon Talbot, un repas et un gite fort satisfaisant pour la nuit.

Le lendemain matin, nous nous laissâmes dériver dans une brume, d’abord faible, plus tard fort épaisse, jusque vis-à-vis du petit cap ou promontoire, du cap St-Ignace. Là, la brume croissante faillit me jouer un mauvais tour ; en m’établissant avec mes plans sur la grève, je remarquai d’autres chasseurs qui guettaient aussi le passage des outardes.

J’attendais, qu’une volée d’outardes qui était allé aux