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Ses yeux étaient plus noirs qu’une nuit sans l’étoile,
Et ses cheveux épais dépliaient un long voile
Sur son corps gracieux comme le jeune ormeau.
Son chant était suave autant qu’un chant d’oiseau.

« Elle était jeune encore, et comptait moins de neiges
Qu’un maladroit chasseur, à la fois, dans ses pièges
Ne prendrait de castors. Elle venait souvent,
Dans le calme de l’ombre et le sommeil du vent,
Se bercer comme un cygne au ruisseau qui murmure.
La vague lui faisait une étrange parure,
Toute de diamants qui luisaient au soleil,
Et ruisselaient au long de son galbe vermeil.

« Areskouï, l’esprit qui nous souffle la guerre,
Que les deuils et les pleurs, hélas ! ne touchent guère ;
Areskouï, le dieu dont l’asile sacré
Était ce roc, pareil au grand navire ancré ;
Areskouï brûlait, pour la rieuse vierge,
D’une invincible ardeur. Et, lorsque de la berge
Il la voyait descendre, et s’approcher des flots,
Il volait au-devant, murmurant de doux mots
Que l’indiscrète brise allait ailleurs redire.
Seule elle pouvait voir le dieu cruel sourire.