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Le chant qui chaque soir succède à la prière.
Son regard est rempli de la vive lumière
Que jette par torrents l’occident enflammé ;
Dans une sainte extase il paraît abîmé.

Balançant dans les airs son aile diaphane,
Au-dessus de son front, un moment, l’ange plane,
Puis il vient près de lui se jeter à genoux.
Il lui parle tout bas un langage bien doux,
Car le dévot marin, pendant une heure entière,
N’entendit ni chanter la jeune batelière,
Dont le fragile esquif se berçait tout auprès,
Ni murmurer la brise à travers les agrès,
Ni gazouiller l’oiseau perché dans les cordages,
Ni rire, ni héler les joyeux équipages.

Et, pendant qu’il était à genoux sur le pont,
Une auréole d’or enveloppait son front.
Mais nul sur le vaisseau ne vit l’ange descendre ;
Et pendant qu’il parlait aucun ne put l’entendre.

Quand le marin sortit de son recueillement,
Les ténèbres du soir montaient au firmament,
Et, sur les flots obscurs, les carènes coquettes
À peine dessinaient leurs sombres silhouettes.