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PICOUNOC LE MAUDIT.

maison est encore à nous. Voici l’acte de donation.

— Oui, Noémie, reprit Picounoc, je vous rends votre propriété. Je ne l’avais acquise que dans ce but… Elle est à vous plus que jamais, et vous ne me devez rien !

Il n’était pas vrai que Picounoc avait acheté cette terre dans le but de la rendre ainsi, de suite, et sans compensation aucune à la veuve indigente. Il avait imaginé ce procédé loyal et généreux pour déjouer les menaces de l’ami bossu. Certes ! jamais moyen ne fut plus noble ni plus sûr. Et le sacrifice, après tout, n’existait qu’en apparence, puisque, selon toute probabilité, la ferme et la veuve reviendraient bientôt au rusé donateur. Le bossu pouvait parler maintenant, et dire de son ami Picounoc tout le mal qu’il voudrait, Picounoc se trouvait protégé par la plus forte des égides : une grande et belle action. Il regrettait une chose, c’était de n’avoir pas songé à cela plus tôt. Il ne se serait pas humilié devant sa fille, et ne l’aurait jamais sollicitée de prendre pour mari l’infâme bossu. Aux paroles de Picounoc, Noémie avait répondu : Je ne vous dois rien, dites-vous ? Oh ! je sens, moi, que