Page:LeMay - Picounoc le maudit (2 tomes en 1 volume), 1878.djvu/162

Cette page a été validée par deux contributeurs.
164
PICOUNOC LE MAUDIT.

des gens, et il vivait seul avec un engagé et Marguerite sa fille. Marguerite était passablement belle, pas sotte du tout, bonne ménagère et fille vertueuse. Lecteurs, ne soyez pas étonnés, la rose croît sur les épines.

Elle était recherchée en mariage de plusieurs garçons de bonne famille, établis sur des terres nouvelles déjà toutes défrichées, ou sur le bien paternel. Mais elle aimait plus haut. Elle était recherchée encore par un parti riche, mais un peu vieux et difforme, le bossu. Celui-ci, elle le fuyait, car elle éprouvait une antipathie singulière non seulement pour sa bosse, mais pour son caractère faux. Le bossu n’en tenait pas moins à ses idées et il ne doutait nullement du succès final ; non pas qu’il espérât jamais sembler un Adonis aux yeux de Marguerite, mais parcequ’il avait le père en sa faveur. Marguerite aimait Victor Letellier, jeune étudiant en droit, fils de Djos le défunt et de Noémie la veuve. Victor Letellier avait-il un penchant pour Marguerite ? je ne le sais pas encore : lui-même le savait-il ? Car l’amour est souvent capricieux : Une femme vous aime, vous en aimez une autre, et celle-ci vous regarde avec indiffé-