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PICOUNOC LE MAUDIT.

sa mère ; mais à la mort de celle-ci, il se trouva seul avec sa sœur. Il eut vite fait de s’établir maître dans la maison, et de tout conduire à sa guise : au reste, il se sentit tout à coup pris du désir d’amasser et se montra fort économe. Emmélie ne le contrariait jamais, et ne paraissait pas savoir qu’elle avait droit à la moitié du petit héritage. La mort de sa mère l’avait laissée bien seule au monde, — car ce frère, à peine connu et si mal élevé, n’était encore qu’un étranger pour elle. N’eut été son amour pour l’ex-élève, elle aurait désiré mourir. Les amis et les voisins, remarquant avec inquiétude les ravages de la peine sur son front candide, s’efforcèrent de la distraire ; mais elle ne voulut pas être consolée, et elle se complut dans son amertume. Les personnes qui aiment et souffrent, refusent souvent les consolations. On dirait que la souffrance et l’amour sont inséparables, et se plaisent ensemble. Une dernière goutte de fiel vint faire déborder la coupe. Un jour elle apprit que les parents de l’ex-élève ne se souciaient pas de la recevoir dans leur famille, à cause de l’ignominie de son père. Car le mystère qui avait plané sur le chef des brigands