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se seraient fait conduire en voiture ; mais la voiture, ils jugeaient que c’était bon pour des femmes ou des malades, et, depuis nombre d’années ils n’en avaient éprouvé ni les commodités, ni les inconvénients. Ils venaient de loin, ces hommes, et l’un d’eux n’avait pas vu depuis vingt ans les flots d’émeraude du plus beau fleuve du monde, ni les campagnes riantes qui l’entourent comme d’un ceinturon d’argent. Inutile de vous décliner les noms de ces étrangers, vous les avez jetés au vent : le grand-trappeur et l’ex-élève ! Eh bien ! oui, l’ex-élève et le grand-trappeur qui s’en viennent embrouiller les cartes et gâter le jeu de Picounoc, au moment où il va gagner la partie. Le grand-trappeur risque tout pour tout, et il le sait bien. Il n’a pas tué sa femme, c’est vrai ; mais il en a tué une autre, et il est meurtrier. S’il se fait connaître, il sera arrêté, jeté en prison ; il s’assiéra sur le banc des accusés, et qui sait ? il montera peut-être sur l’échafaud. S’il demeure inconnu, il verra sa femme, qui se croit veuve et libre depuis vingt ans, passer enfin dans les bras d’un autre !… Effrayante alternative ! Mais ne pourrait-il pas se faire connaître de sa femme seulement, lui dire de